Calmement assis sur scène, on pourrait presque croire que ces huit explorateurs s’en contenteraient. Et pourtant. Ingénieur-spationaute, éco-explorateur, médecin-explorateur, pilote-consultant-éco-entrepreneur, alpiniste-explorateur, championne de voltige aérienne, psychiatre-savanturier, et astrophysicien-planétologue… ces femmes et ces hommes ont à leur actif des exploits plus remarquables les uns que les autres. Derrière ces noms de métiers insolites, vous aurez peut-être reconnu Jean-François Clervoy, Raphaël Domjan, Jean-Louis Etienne, Gérard Feltzer, Laurence de la Ferrière, Catherine Maunoury, Bertrand Piccard et Francis Rocard, qui se sont autorisés à rêver l’impossible, et ont osé le réaliser. C’est cependant une exploration d’un autre genre dont ils annonçaient le lancement jeudi soir au sein de l’Aéroclub de France. En toute humilité, ils ont choisi de s’investir dans cette nouvelle aventure qui les rassemble et qui n’en est pas moins pionnière : Latécoère Explorer.
Le court-métrage réalisé par Méliane Rocher, jeune réalisatrice ingénieuse déjà primée au Festival des Etoiles et des Ailes, présente le projet et ses huit membres fondateurs précités. Latécoère Explorer a vu le jour grâce à l’énergie d’une femme, mue elle aussi par l’esprit des pionniers : Marie-Vincente Latécoère. Belle-fille de Pierre-Georges Latécoère, elle a pour volonté de poursuivre et d’encourager cette quête de l’inédit. Présidente de la Fondation éponyme, elle met tout en oeuvre depuis plus de 30 ans pour préserver la mémoire de la Ligne et confirme que Latécoère Explorer est un prolongement naturel de ses démarches : « pour moi, c’est la suite logique de tout ».
Latécoère Explorer a en effet pour mission de cautionner les expéditions ou projets de jeunes explorateurs audacieux et courageux, afin de mettre en lumière leurs idées et faciliter la recherche de mécènes. Les principaux critères de sélection sont la notion d’exploration géographique, l’innovation et le challenge. Pour cette première année, c’est avec l’ONG partenaire, La Guilde Européenne du Raid, que les projets ont été sélectionnés. Si le choix s’est fait dans un contexte francophone, Latécoère Explorer a bien pour vocation une ouverture aux projets de toutes nationalités.
Les membres fondateurs se sont alloués une autre tâche en partenariat avec le ministère de l’Environnement : donner un message d’avenir aux jeunes de 5 à 25 ans, en intervenant notamment au sein des écoles pour promouvoir leurs valeurs et le goût d’explorer. « Ce qui me touche dans ce projet, c’est que nous sommes huit explorateurs à avoir accompli nos rêves et que nous allons soutenir des jeunes qui n’ont pas encore atteint le leur, mais qui rêvent de l’accomplir. Nous sommes comblés par la vie et nous allons pouvoir transmettre le flambeau », précise Bertrand Piccard. « Il ne faut pas que nous soyons considérés comme surhumains. Nous ne devons pas faire à leur place, mais leur montrer le chemin, les accompagner », développe-t-il.
Laurence de la Ferrière souligne également l’importance du rôle de conseil que le projet va apporter : « quand j’ai commencé à grimper autour de l’Himalaya, à faire de grandes expéditions, j’aurais aimé avoir des gens autour de moi qui me guident dans la manière de communiquer, dans la préparation du matériel, etc. En réunissant cette équipe, nous avons pensé que nous pouvions peut-être apporter ça ». Membre fondateur de Latécoère Explorer mais aussi présidente de l’Aéroclub de France, Catherine Maunoury ajoute que « presque tout le monde peut être explorateur. La vraie difficulté, c’est de garder le focus. Le challenge, c’est d’être toujours motivé. Avec Latécoère Explorer, nous cherchons la qualité plutôt que la quantité. Nous avons la volonté d’associer l’Aéroclub de France à cette dynamique pour explorer ensemble de nouvelles voies ».
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© Marie Christophe / Le Journal de l’Aviation
Le premier projet sélectionné s’appelle Kid. Polar Kid. Remarquablement portée par l’aviateur Loïc Blaise, atteint d’une sclérose en plaques, l’expédition a pour vocation un tour du monde des glaces le long du cercle polaire arctique. « La combativité c’est quelque chose de contagieux », souligne-t-il. Pas moins de cinquante étapes jalonneront le parcours de 22 000 kilomètres. Cosmonautes, voltigeurs et chasseurs se relayeront à bord d’un hydravion ultraléger d’un peu moins de 10 mètres d’envergure et de 300 kilos à vide, avec l’envie commune de véhiculer un double message : combattre le renoncement et immortaliser les clichés d’une banquise vouée à disparaître incessamment sous peu. « Loïc met en parallèle la dégradation de sa santé et celle du climat. C’est un formidable ambassadeur. Nous sommes tous concernés par cette maladie et par le changement climatique », insiste Gérard Feldzer.
« Tout est parti d’une urgence, mais je n’ai pas voulu en rester là » explique Loïc Blaise. « La situation en Arctique est tellement à l’image de ce que je vis moi, que j’ai imaginé le lien pour en faire quelque chose de très positif et symbolique. On n’a pas le droit baisser les bras même si c’est difficile. On ne pourra pas arrêter la mutation de l’écosystème, mais on peut prendre les devants ». Loïc a aussi à coeur de partager son aventure avec les enfants. « Grâce aux technologies de réalité virtuelle, ils pourront vivre l’expédition depuis chez eux ou depuis leur lit d’hôpital en même temps que moi. »
Tout au long de la soirée, nous assistons à l’émulation d’une famille : bienveillance, enthousiasme, encouragements sont membres à part entière de la dynamique Latécoère Explorer. Ainsi, Bertrand Piccard se veut aussi rassurant pour le jeune homme : « si tu rencontres des problèmes techniques, rappelle-toi que c’est une aventure utile. Si tu doutes, sache que derrière toi il y a des millions de gens qui ne vont pas douter ».
Aujourd’hui, les explorateurs « parrains » de Latécoère Explorer encouragent l’expédition de Loïc Blaise, mais le départ prévu pour juin 2017 dépend encore de la contribution de derniers mécènes. A bon entendeur.
Deuxième temps fort de la soirée, la remise du premier trophée Latécoère Explorer. Emue, Marie-Vincente Latécoère récompense Bertrand Piccard avec le prix 2016 pour son tour du monde à l’énergie solaire à bord du Solar Impulse. « Recevoir de vos mains Marie-Vincente, un trophée aéronautique avec mon avion dessus, cela représente énormément pour moi. Je m’en rappellerai toute ma vie ». Réalisée par Aerodesign, la pièce était un défi en soi. « C’était presque facile d’avoir l’idée mais la réalisation c’est autre chose » affirme Agnès-Patrice Crépin, talentueuse créatrice qui fige avec virtuosité les grands instants de l’aérien.
Nul doute que cette dynamique intemporelle va prendre de l’ampleur. Dans un monde de plus en plus cadré et encadré, sécurisé et surveillé, l’exploration semble apporter l’adrénaline et l’oxygène nécessaires à l’équilibre de l’Homme, dans le respect de son environnement. En soutenant le projet de Loïc Blaise, Latécoère Explorer lance un message fort au service de l’innovation, du partage, de la volonté, de la liberté. L’esprit des pionniers demeure via ces mains tendues entre les Hommes, cette insatiable envie d’aller encore et toujours plus loin, ensemble. Le mot d’ordre est donné : Humanité.
Pour toute information supplémentaire :
Latécoère Explorer
Polar Kid
© Marie-Cécile Desalbres